lundi 31 décembre 2012

La mort de la mort. Numéro 45. Décembre 2012.

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Si j'ai la chance de vivre 150 ans, je m'attends à trouver un monde où se soucier de la politique ethnique au Moyen-Orient, porter des symboles d'une université, impressionner les filles, et enquêter sur mes origines ancestrales ne sera pas d'un grand intérêt. En d'autres termes, je pense que je devrai inventer un nouveau moi pour un monde radicalement nouveau. Cela sera un défi plus grand que tout ce que je peux imaginer. Nous avons de bonnes raisons évolutionnaires de nous aimer jusqu'à la mort plutôt que d'espérer devenir complètement reconfiguré. C'est une perspective angoissante à imaginer, mais c'est tout sauf ennuyeux. Joshua Lipson. The Harvard Crimson. Dans un article du 17 décembre 2012 intitulé On Living Forever. Radical life extension is no myth. (traduction)


Thème du mois: Médicaments et autres produits pour allonger la durée de vie en bonne santé.


Depuis des millénaires, des femmes et des hommes espèrent trouver une substance permettant d'échapper aux maladies et à une issue fatale.  Depuis l'aube de l'humanité, les êtres humains donnent à leurs proches souffrants des substances dont ils espèrent un effet bénéfique. Il s'agit de décoctions, de potions issues de plantes, de champignons, de minéraux, de produits animaux. Très souvent, une puissance supérieure, religieuse, est censée jouer un rôle bénéfique dans leur élaboration.

Aujourd'hui, nous savons pour certains de ces produits, par exemple le mercure, qu'ils sont toxiques au point de pouvoir abréger la vie de ceux qui les consomment. Pour toute substance, la composition précise des molécules et de l'ADN présents peut désormais être connue. Mais cette connaissance infiniment plus vaste qu'il y a des milliers d'années et même considérablement plus importante qu'il y a à peine 30 ans, ne suffit pas à répondre à la question de l'efficacité du produit pour permettre une vie en bonne santé beaucoup plus longue.

Pour savoir si un produit est efficace, à ce jour, rien ne remplace le moyen immémorial: essayer. Au moyen-âge, le goûteur du seigneur vérifiait l'absence de poison. Aujourd'hui, la vérification se fait par des tests réalisés surtout sur des êtres humains, des rats et des souris. Elle est également réalisée par l’examen des résultats d'études épidémiologiques, c'est-à-dire des études visant à évaluer la prévalence de maladies dans des populations et la présence de facteurs qui contribuent à ces maladies.

Pour être tout à fait certain d'un effet positif en matière de longévité sur des sujets actuellement en bonne santé, il faudrait effectuer des études de long terme, études en "double aveugle", c’est-à-dire qu’un groupe de personnes reçoit un médicament et l'autre un placebo, ceci sans que ni les examinateurs, ni les examinés ne sachent qui reçoit quoi. Comme une comparaison durant des années est nécessaire, ce type d'étude ne permettra pas de progrès médicaux rapides.

En ce qui concerne les études épidémiologiques, elles doivent être examinées avec beaucoup de circonspection parce qu'un effet constaté de longévité peut avoir de multiples causes. Ainsi, s'il est constaté qu'un groupe de patients utilisant un médicament vit plus longtemps qu'un autre groupe de patients sans médication, cela peut être suite à de nombreuses causes indépendantes du produit ingéré lui-même. Il peut s'agir d'un effet placebo, cela peut être parce que les personnes prenant un médicament sont mieux suivies par les médecins, parce qu'un groupe est en meilleure santé que l'autre. Enfin, pire, il peut y avoir des erreurs de calcul, voire une orientation inexacte donnée volontairement ou involontairement.

Mais les études épidémiologiques peuvent néanmoins être très utiles. Le comportement de consommation de médicaments et de nourriture de populations est suivi depuis très longtemps. Il ne faut donc pas attendre avant de pouvoir examiner les résultats. Par ailleurs, l'observation statistique précise peut permettre de repérer des effets, positifs pour la longévité, de produits qui, au départ, ne sont pas consommés pour des raisons de santé.  Un médicament ayant comme "effet secondaire" une longévité accrue pourrait être découvert de cette manière. Parallèlement, des effets négatifs en termes de durée de vie peuvent également être décelés.

Quelques résultats encourageants

L'antidouleur le plus connu peut avoir des avantages inattendus au profane. Selon plusieurs études, l'aspirine (acide acétylsalicylique) diminue la probabilité de développer des maladies liées à la circulation sanguine. Il est quasiment certain que l’absorption d'aspirine diminue le risque d’accident cardiovasculaire et donc augmente l’espérance de vie. Il est probable que cet effet positif compense une alimentation devenue globalement trop riche pour la grande majorité des individus. D'autres produits "fluidifiant" le sang, telles les statines, pourraient avoir des effets similaires. Une combinaison de médicaments pourrait permettre des effets positifs accrus (en anglais le terme "polypill" est employé pour désigner ce type de produit).

La metformine est connue comme étant le médicament antidiabétique le plus efficace, le plus sûr (il est prescrit à plus de 120 millions de personnes) et de très loin le moins cher. Elle semble avoir de nombreux effets positifs sur la santé. Elle réduirait notamment considérablement la mortalité des diabétiques de type 2 tant par rapport aux personnes recevant des traitements classiques que par rapport aux personnes recevant uniquement des conseils diététiques. Il semble également établi que la metformine diminue le risque de cancer, en tout cas chez les souris.

La rapamycine a été découverte en 1975. Elle a été obtenue à partir d’une bactérie provenant du sol de l’île de Pâques. Jusqu’il y a peu, elle était connue comme médicament immunodépresseur lors de transplantations. Mais en 2009, une étude portant sur des souris a conclu à une augmentation importante de la durée de vie. Il s’agit de résultats spectaculaires qui ont été confirmés tant sur des souris jeunes que sur des souris âgées. Transposée à l’homme, ce type de produit s’il avait le même effet, pourrait faire gagner une dizaine d’années de vie en moyenne, c’est-à-dire davantage que toute autre méthode actuellement connue. Aucun test probant sur l’homme n’a cependant encore été réalisé.

D'autres produits pourront être examinés dans un avenir proche. Leur utilisation à court et moyen terme dépendra notamment des efforts financiers et du degré de prise de conscience des progrès possibles par les pouvoirs publics, par les universités et, de manière plus intéressée, par les firmes pharmaceutiques.


La bonne nouvelle du mois: réunion internationale prometteuse à Bruxelles.


Les 12, 13 et  14 décembre 2012, une conférence intitulée Eurosymposium on Healthy Ageing s'est tenue dans la capitale de l'Europe. Des experts et des militants de la longévité venus du monde entier se sont rencontrés. Une représentante de l'Union européenne est également intervenue. Le thème de la conférence était: Un nouvel âge de santé et de longévité à long terme. Des perspectives enthousiasmantes ont été décrites notamment en ce qui concerne la possibilité de traitement généralisé par médicament pour les personnes âgées de plus de 50 ans pour diminuer l'impact des maladies cardiovasculaires (exposé du Docteur David Wald, Queen Mary, University of London).



Pour en savoir plus :

·         De manière générale: http://heales.org, http://longecity.org, http://sens.org et http://immortalite.org
·         Au sujet de tests de produits relatifs à la longévité: http://www.youtube.com/watch?v=uZLGYGjyX2U Stephen Spindler, Brussels, 14 décembre 2012
·         Eurosymposium on Healthy Ageing: http://www.eha2012.org/ et http://www.youtube.com/user/healesmovies
·         Polypill: http://en.wikipedia.org/wiki/Polypill
·         Source de l'image: Manifestation Grand-Place de Bruxelles, 114 décembre 2012.

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