samedi 14 juillet 2012

La mort de la mort. Numéro 39. Juin 2012.



L’éternité c’est long surtout sur la fin. Woody Allen. 


Thème du mois : Vieillissement et cosmétiques



S'il est un domaine de la lutte contre le vieillissement qui motive les femmes et les hommes depuis des siècles et même des millénaires, c'est bien celui de l'aspect esthétique de leur apparence physique.

Pour les hommes, le symbole par excellence de l'âge, c'est la calvitie ainsi que la décoloration du système pilaire, les "cheveux blancs". La perte des cheveux et leur décoloration sont effectivement fortement liées à l'âge et à l'influence progressive de certaines hormones mâles.

Pour les femmes, ce qui est recherché par-dessus tout aujourd'hui, c'est d'éviter les rides. Autrefois, avant l'utilisation massive des soutiens-gorge, le maintien de la poitrine était aussi très important.

Chez les hommes comme chez les femmes, les rides sont dues à une perte progressive de l'élasticité de la peau elle-même consécutive à la disparition progressive de deux protéines, les collagènes et l'élastine. La fin du vers de Racine "Elle eut soin de peindre et d'orner son visage. Pour réparer des ans l'irréparable outrage." est devenue emblématique du souhait de conserver l'aspect physique.

Les soins cosmétiques font l'objet de dépenses énormes. Au niveau mondial, environ 200 milliards de dollars sont dépensés chaque année.  Cela dépasse de très loin les dépenses consacrées à la médecine préventive dite anti-âge.

Les représentants de l'industrie cosmétique affirment ou sous-entendent que les sommes consacrées à la recherche relative à la lutte contre les conséquences esthétiques du vieillissement sont importantes. Ils suivent de près l'évolution des connaissances pour proposer des produits censés être à la pointe des capacités scientifiques. Ainsi, des produits radioactifs étaient vendus au milieu du siècle passé quand l'énergie nucléaire apparaissait entre autres comme une source de bienfaits de santé. Les cosmétiques contenant des antioxydants sont aujourd'hui nombreux. Des affirmations statistiques du type "effets mesurables prouvés pour 87 % des utilisatrices" seront également utilisées pour ajouter un vernis scientifique supplémentaire.

En fait, les recherches réellement intéressantes dans le cadre de la limitation ou de l'inversion de processus de vieillissement sont rares. Ceci s'explique parce qu'un produit cosmétique, par définition, est un produit qui n'agit que sur l'épiderme et pas sur l'ensemble du corps. De plus, réaliser un produit supposé avoir des effets positifs ne se limitant pas à la peau, ce serait par définition réaliser un produit médical et non pas un produit seulement cosmétique. En outre, les conditions juridiques pour la mise sur le marché d'un produit non purement cosmétique sont beaucoup plus exigeantes.

L'efficacité est donc réduite et les dépenses consacrées à la recherche sont en fait très inférieures aux autres dépenses de l'industrie cosmétique.  Ces dernières sont surtout liées à la publicité dont celles concernant le choix de l’emballage.

Concrètement, cela signifie que, malgré les sommes gigantesques  concernées, l'industrie cosmétique ne permet donc pas d'amélioration de la durée et de la qualité de la vie. Dans le monde, la source principale de dépenses ayant pour but premier de diminuer les conséquences de l'âge est donc aussi la moins efficace. Elle se réduit quasiment à l'influence psychologique découlant d'un aspect en bonne santé ainsi qu'à l'effet placebo.

Il peut apparaître comme illogique que les femmes et, dans une moindre mesure, les hommes dépensent plus pour pallier aux conséquences du vieillissement que pour s'efforcer de le prévenir. Il est vrai que les dépenses pour les produits cosmétiques ont un effet visible immédiatement et largement exagéré par la publicité. Par contre, les recherches concernant un futur encore perçu comme totalement hypothétique attirent beaucoup moins.

Mais ceci signifie également que le jour où les citoyennes et citoyens se rendront compte que le ralentissement du vieillissement et, à plus long terme, le rajeunissement ne sont plus des objectifs totalement hypothétiques, ils pourraient être prêts à des investissements considérables à ce sujet. Un jour, un lapin ou une souris ne sera peut-être plus médiatisé dans sa cage parce qu'il teste un cosmétique (ce n'est déjà plus guère le cas), mais bien pour battre un record de durée de vie en bonne santé.


La bonne nouvelle du mois : l'efficacité de la rapamycine est confirmée.


La rapamycine, également appelé sirolimus, est une molécule produite par une bactérie découverte dur l'île de Pâques en 1975. Cette molécule est utilisée médicalement dans le cadre de traitement anti-rejets suite à des greffes. Elle a des effets immunosuppresseurs. Depuis quelques années, il a été également découvert que des souris de laboratoires recevant cette substance vivaient nettement plus longtemps.

Dans un article paru au mois de juin dans la revue Neuroscience, des chercheurs américains de la "University of Texas Health Science Center" ont également constaté, toujours sur des souris, que l'administration de rapamycine diminuait l'anxiété des souris et augmentait leurs performances cognitives. 

Si les résultats mesurés sont confirmés, ceci signifie probablement que l'efficacité de la rapamycine en terme d'augmentation de la durée de vie s'explique par une efficacité contre les mécanismes neuro-dégénératifs. Or, c'est dans ce domaine que les progrès médicaux sont actuellement les plus lents, particulièrement pour ce qui concerne la maladie d'Alzheimer.

 Pour en savoir plus :