dimanche 14 mars 2010

25.000 logements publics bruxellois en 3.600 jours (Numéro 5). Mars 2010.

Les accords gouvernementaux régionaux bruxellois de l'été 2009 sont ambitieux. Ils prévoient, d'ici à 2019, une augmentation radicale du nombre de logements publics par une norme à atteindre dans les 10 années à venir de 15% de logements de qualité à gestion publique et à finalité sociale.

Il semble que le pourcentage actuel de logements publics soit de 10 % mais les chiffres exacts ne sont pas connus. Concrètement, pour atteindre la norme, environ 25.000 logements publics devraient donc être créés en deux législatures (20.000 logements selon les estimations les plus "basses"). Il s'agit donc d'au moins 200 logements par mois.

C'est une mesure extrêmement volontariste que des dizaines de milliers de personnes attendent avec impatience dans une ville où il peut faire bon vivre lorsque le logement est assuré, mais où ledit logement engouffre la majorité du budget des plus démunis.

Neuf mois après les élections régionales et huit mois après la création du nouveau gouvernement, les signes concrets incitent au pessimisme quelle que soit la bonne volonté des uns et des autres. La préoccupation affichée et théoriquement louable de concertation préalable cache mal la douloureuse absence d'avancées concrètes.

L'objectif nouveau ne concerne plus seulement la construction ab nihilo de logements, mais aussi la transformation de bureaux et de biens à l'abandon en logements ainsi que la poursuite de constructions déjà entamées. Et les accords concernent des constructions et des transformations sur le court, moyen et long terme, c'est-à-dire, logiquement, à terme long de 10 ans, moyen de quelques années et court de quelques mois.

Pour les objectifs à terme de quelques mois, on peut déjà affirmer la quasi-certitude de l'échec. En effet, jusqu'ici, rien de concret n'est annoncé dans ces domaines. Alors que par contre, le temps passé a permis d'abandonner un projet de la législature précédente et de revoir d'autres projets à la baisse.

Si l'objectif gouvernemental était rempli, il faudrait construire, rénover et transformer. Un logement construit coûte en moyenne au moins 300.000 € tout compris (terrain, construction, ...). Une rénovation ou une transformation, parfaitement économe et efficace, pourrait coûter aux alentours de 50.000 € tout compris par habitation. Le strict minimum imaginable en moyenne par habitation réalisée peut donc être estimé à 100.000 € par logement concerné. En ce sens, comme quasiment aucun logement n'est encore créé, les autorités régionales et locales épargnent actuellement au moins 20 millions d'€ par mois.

La présente lettre bimestrielle a pour objectif d'être un modeste aiguillon pour qu'une partie même minime des objectifs soit réalisée.


Etat de la réalisation des 25.000 logements en 3.600 jours (connu au 25 mars 2010):

  • nombre de logements publics nouveaux construits: 58
  • nombre de logements publics créés à partir de bureaux transformés: 0
  • nombre de logements publics créés à partir de logements et autres immeubles abandonnés: 0
  • nombre de logements publics créés par d'autres moyens (acquisitions, locations,...): 0
  • (-) Suppressions de logements publics (acquisition par les locataires, destructions,...): 0
  • Nombre total de logements publics nouveaux réellement créés: 58
  • Temps écoulé : 8 mois depuis les accords politiques (9 mois depuis le début de la législature)
  • Temps restant pour achever la mise à disposition des logements : 111 mois
  • Nombre total de logements publics qui devraient en principe être créés durant le temps écoulé (sur la base de 200 logements par mois): 1.800
  • Somme minimale économisée par les autorités régionales ou locales bruxelloises aux dépens des personnes qui occuperaient les logements: 180.000.000 €


Informations complémentaires:

- Un site http://www.planlogement.be avait été réalisé par le Secrétariat d'Etat bruxellois au Logement et à l'Urbanisme de la législature précédente. Seule la page d'accueil du site est encore accessible, mais le contenu en a été supprimé il y a trois mois. Il semble qu'un site nouveau doit être réalisé à terme par l'administration mais ceci semble presque aussi complexe à construire qu'un logement social en vraies briques.

- Le texte de l'accord de gouvernement 2009-2014 du 12 juillet 2009 est accessible à la page
http://www.parlbruparl.irisnet.be/images/imgparl/accords2009/accordsfr.pdf.

- Au salon Batibouw, début mars, Christos Doulkeridis, secrétaire d'état compétent pour le logement, déclare «L’accès à la propriété est pour les ménages la meilleure voie vers l’émancipation et l’autonomie : c’est donc une voie à encourager et à développer politiquement. Je la soutiens pleinement». Ce serait une bien belle déclaration nonobstant un gros détail financier: même avec une aide régionale, les citoyens en attente de logements sociaux n'ont actuellement que très rarement les moyens d'accéder à la propriété.


Si vous communiquez des informations pertinentes, elles seront diffusées dans la prochaine lettre.

Didier Coeurnelle, conseiller communal à Molenbeek-Saint-Jean

dimanche 7 mars 2010

La mort de la mort. Numéro 12. Février 2010.

Complément au pari de Pascal : et si d’avoir souscrit à des niaiseries pouvait nous coûter l’immortalité. (Jean Rostand, 1894-1977, Pensées d'un biologiste)

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Thème du mois. Démographie et vie avec un vieillissement négligeable.

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Jamais dans l'histoire de l'humanité, nous n'avons été aussi nombreux. Et chaque jour, la population mondiale augmente encore. Mais elle augmente de moins en moins vite.

Plus les citoyens ont un niveau de vie élevé, plus ils vivent longtemps. Et parallèlement, plus les citoyens ont un niveau de vie et vivent longtemps, moins ils ont d'enfants. Durant ces dernières décennies, cette évolution a même été tellement spectaculaire que dans les pays où la vie est la plus longue, la population a commencé à diminuer.

Il est donc permis de s'imaginer que, contrairement à l'intuition, un monde sans vieillissement sera un monde avec une croissance plutôt faible de la population.

Un chercheur russe, Leonid Gavrilov, s'est ainsi livré à des projections basées sur la population suédoise. Si demain par miracle (ou "par cauchemar" pour certains), la mortalité suite au vieillissement disparaissait, mais que les autres paramètres restaient identiques, dans un demi-siècle, la population de ce pays scandinave n'aurait augmenté que de 35 %.

En fait, en cas de ralentissement radical du vieillissement, l'évolution la plus probable est la suivante:

- Dans un premier temps, si l'espérance de vie devient beaucoup plus longue, il sera possible aux femmes d'être fécondes bien plus longtemps; la population aura donc presque tendance à se stabiliser parce que beaucoup de femmes décideront d'attendre plus longtemps pour avoir des enfants.

- Ensuite, durant plusieurs décennies, la population augmenterait assez lentement à un rythme un peu plus rapide que si la mort de vieillesse était maintenue, mais pas tellement plus.

- Ce n'est qu'à long terme, si plusieurs générations capables d'avoir des enfants coexistent et si les générations antérieures continuent à avoir des enfants que l'évolution de la population devient préoccupante. Mais le jour où le vieillissement deviendra négligeable, nous aurons des décennies pour nous adapter. En fait, le temps d'adaptation sera aussi long que le temps qui a été nécessaire -dans de nombreux Etats du monde- à la natalité pour passer de quatre enfants par couple à deux enfants -voire moins- par couple.

La peur de la surpopulation date d'il y a des siècles. C'est l'économiste et pasteur anglican, Thomas Malthus qui sera le plus célèbre propagateur de l'idée du danger de l'augmentation trop rapide de la population, il y a un peu plus de 200 ans. Cette peur se propageait alors que la population mondiale comptait moins d'un milliard d'habitants. Aujourd'hui avec 8 fois plus de citoyens du monde, le niveau de vie moyen atteint est immensément supérieur à celui qui régnait en l'an 1800. Même s'il reste insuffisant pour des centaines de millions de citoyens du monde,

Ce n'est donc, répétons-le, qu'au terme d'un demi-siècle que nous aurons à choisir entre vivre plus longtemps et avoir autant d'enfants qu'aujourd'hui. A moins que le monde n'ait tellement changé entretemps que ces questions se posent d'une manière que la plupart d'entre nous ne peuvent encore imaginer aujourd'hui.

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La bonne nouvelle du mois: en Belgique l'espérance de vie en bonne santé semble augmenter plus vite que l'espérance de vie

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Selon les indicateurs de protection sociale en Belgique publiés tout récemment, non seulement, contrairement à ce qui est souvent affirmé, ce n'est pas seulement l'espérance de vie qui augmente, mais aussi l'espérance de vie en bonne santé. Et même, mieux que cela, selon les chiffres publiés, l'espérance de vie en bonne santé augmenterait plus rapidement. Ainsi, entre 2004 et 2006, l'espérance de vie en bonne santé à 65 ans aurait augmenté d'un an pour les hommes (de 8,5 à 9,5 années) et d'1,4 an pour les femmes (de 8,4 à 9,8 années).

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• Pour en savoir plus: http://sens.org, http://imminst.org, http://heales.org et http://immortalite.org, pour l'information relative aux projections démographiques en Suède: http://www.psychologytoday.com/blog/adventures-in-old-age/200912/would-immortality-become-overpopulation-nightmare et pour les indicateurs de protection sociale en Belgique: http://socialsecurity.fgov.be/docs/fr/publicaties/belgian-social-protection-2010-fr.pdf.

• Pour réagir ou recevoir la lettre d'information: info@heales.org