samedi 11 décembre 2010

25.000 logements publics bruxellois en 3.600 jours (Numéro 9). Novembre 2010.

Les accords gouvernementaux régionaux bruxellois de l'été 2009 semblent ambitieux. Ils prévoient, en une période de 10 années, une augmentation radicale du nombre de logements publics par une norme à atteindre dans les 10 années à venir de 15% de logements de qualité à gestion publique et à finalité sociale.

La présente lettre bimestrielle a pour objectif d'être un aiguillon pour favoriser la réalisation même partielle des objectifs.

Au rythme actuel, selon les calculs retenus jusqu'ici, il faudra extrêmement longtemps pour réaliser l'objectif décennal de création de logements sociaux.

Cependant, calculer exactement le nombre de logements concernés apparait aujourd’hui fort compliqué. Ainsi:

- La région bruxelloise compte actuellement un parc total de logements d'environ 550.000 logements. Mais la population bruxelloise est en croissance rapide(actuellement de l'ordre de 1,5 % par an). Cette croissance est accompagnée d'une croissance du nombre de logements (actuellement de l'ordre de 5.000 logements par an). Si la tendance se poursuit pendant 10 ans, à l'horizon 2020, il y aura plus de 600.000 logements. Il faudra donc créer environ 7.500 logements à vocation sociale en plus pour simplement maintenir constant le pourcentage de logements à vocation sociale.

- Selon certaines interventions du secrétaire d'État compétent pour le logement, Christos Doulkeridis, l'objectif de 15 % ne se base plus uniquement sur les logements publics à vocation sociale. Il inclut, les logements mis en location par les Agences immobilières sociales (AIS) à un prix inférieur à celui du marché et les logements acquis grâce aux 900 prêts hypothécaires octroyés chaque année à des taux avantageux par le Fonds du logement.

- L'objectif à atteindre est un objectif de 15 % pour chaque commune. Théoriquement, cela pourrait signifier un total final à atteindre au niveau bruxellois supérieur à 15 % (puisque certaines communes comme Watermael-Boitsfort ont déjà plus de 15 % de logements public à vocation sociale sur leur territoire).

- Enfin les dix années prévues pour arriver à l'objectif pourraient s'allonger un peu: par exemple de 2009 à 2020.

En tenant compte des éléments qui précèdent, le calcul du nombre de logements à créer varie énormément de quelques milliers de logements en 11 ans à environ 40.000 logements en 10 ans.

Ce qui semble malheureusement certain quelle que soit le mode de calcul et quelle que soit la bonne volonté des uns et des autres, c'est que le nombre de logements à vocation sociale créés est très inférieur à la demande.

La synthèse des résultats ci-dessous indique l'état d'avancement par rapport à un objectif moyen de 25.000 logements. Il y a été tenu compte des logements mis à disposition par les agences immobilières sociales (A.IS.) même s'il ne s'agit pas au sens strict de logements à gestion publique mais il n'a pas été tenu compte des prêts du logement car ils concernent des immeubles à gestion totalement privée.

Seuls les logements effectivement mis à disposition sont comptabilisés: les chantiers, projets en cours de marché public,... ne sont pas repris. Ils seront mentionnés dans une prochaine lettre.


État de la réalisation des 25.000 logements en 3.600 jours (connu au 30 novembre 2010)(ce mode de calcul ne prend pas en compte les prêts sociaux):

  • Nombre de logements publics nouveaux construits dans le cadre du plan dit des 5000 logements: 68

  • Nombre de logements publics créés à partir de bureaux transformés: 0

  • Nombre de logements publics créés à partir de logements et autres immeubles abandonnés: 0

  • Nombre de logements publics créés par d'autres moyens (acquisitions, locations, contrats de quartier...): non connu avec précision, peut-être aux alentours de 300

  • Nombre de logements privés mis à disposition par les A.I.S.: non connu avec précision, probablement aux alentours de 400

  • (-) Suppressions de logements publics (acquisition par les locataires, destructions,...): non connu avec précision, probablement aux alentours de 0

  • Nombre total de logements publics nouveaux réellement créés: aux alentours de 800

  • Temps écoulé : 16 mois depuis les accords politiques (17 mois depuis le début de la législature)

  • Temps restant pour achever la mise à disposition des logements : 105 mois

  • Nombre total de logements publics qui auraient dû être créés durant le temps écoulé (sur la base de 200 logements par mois): 3.400

  • Somme minimale économisée par les autorités régionales ou locales bruxelloises aux dépens des personnes qui occuperaient les logements (sur base d'un coût de 100.000 € par logement): 260.000.000 €


Informations complémentaires:

- Le texte de l'accord de gouvernement 2009-2014 du 12 juillet 2009 est accessible à la page
http://www.parlbruparl.irisnet.be/images/imgparl/accords2009/accordsfr.pdf.

- Un site http://www.planlogement.be avait été réalisé par le Secrétariat d'Etat bruxellois au Logement et à l'Urbanisme de la législature précédente. Seule la page d'accueil du site est encore accessible, mais le contenu a été supprimé.


Si vous communiquez des informations pertinentes, elles seront diffusées dans la prochaine lettre.

Didier Coeurnelle, conseiller communal à Molenbeek-Saint-Jean

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vendredi 3 décembre 2010

La mort de la mort. Numéro 20. Novembre 2010.


Pour sauver une vie, pour guérir quelqu'un, beaucoup doit être possible. Si je devais être amené à choisir entre une personne avec un passé et une conscience et un embryon, mon choix serait vite fait (Rik Torfs. Professeur de droit canon, sénateur belge, dans De Standaard, samedi 6 novembre 2010, traduction)




Thème du mois: "Un siècle d'évolution de l'espérance de vie".




La vie d'un être humain est son bien le plus précieux. Depuis quelques siècles, certains s'aventurent à en mesurer sa longueur moyenne. Bien sûr, la précision des chiffres diffusés ici et ailleurs est en partie une illusion. D'une source à l'autre, les statistiques peuvent être très différentes suite à des erreurs, à des différences de calcul ou à des différences "créées" pour cacher des évolutions négatives. Néanmoins, l'exactitude s'améliore constamment et les grandes tendances sont peu contestées.

L'évolution générale largement positive de l'espérance de vie durant la période 1910 - 2010 est connue de la plupart d'entre nous. Mais bien des aspects spécifiques sont beaucoup moins perçus. En voici quelques uns:

1910 - 2010. Une évolution positive sans aucune exception.

Quel que soit le pays, du Swaziland où l'espérance de vie est actuellement la plus basse au monde jusqu'à Andorre où la durée de vie est la plus longue, partout l'évolution a été positive si l'on compare la situation contemporaine à la situation d'il y a un siècle. Le bébé que tient dans ses bras un centenaire africain presque un miraculé - comme le bébé que tient dans ses bras un centenaire japonaise - une situation devenue relativement banale - a l'espoir de vivre plus longtemps que son aïeul. Mais il est vrai que, pour certaines naissances en Afrique subsaharienne, le gain global n'est que de quelques années alors que pour l'immense majorité des autres nations, il se compte en décennies.

L'évolution positive sur un siècle peut être interprétée de manière plus large encore. En 1910, l'espérance de vie n'atteignait les 60 ans dans aucun pays au monde et seuls quelques pays scandinaves dépassaient les 55 ans. En 2010, la durée de vie moyenne n'est inférieure à 60 ans que dans quelques dizaines de pays et, selon l'ONU, elle n'est inférieure à 55 ans que dans certains pays d'Afrique subsaharienne. Autrement dit, de ce point de vue en tout cas, il vaut mieux naître dans un pays pauvre aujourd'hui que dans un pays riche il y a 100 ans.

1910 - 1960. Les grandes tendances.

De la veille de la première guerre mondiale à l'aube des Golden Sixties, le monde change radicalement et des centaines de millions de citoyens découvrent une société où les enfants meurent de plus en plus rarement. Le droit à la pension, ou en tout cas à une vieillesse, sans être encore la règle générale, devient une probabilité forte. Malgré les deux guerres mondiales, l'Europe et l'Amérique du Nord font des bonds de géant. En Russie, les citoyens soviétiques passent d'une vie moyenne de 35 à 69 ans, les citoyens français de 51 à 70 ans et les Américains de 51 à 70.

En 1960, pour les Européens, tant à l'Est qu'à l'Ouest du rideau de fer et pour les Américains, les décès "prématurés" avant l'âge de la pension sont donc déjà devenus rares.

Dans les pays du Sud, l'augmentation est aussi spectaculaire mais elle part de bien plus bas. Un citoyen indien vit en moyenne 42 ans en 1960 contre seulement 23 en 1910 et un brésilien 55 années au lieu de 32.

1960 - 2010. Globalement les progrès se poursuivent.

Durant les cinq dernières décennies quatre grands ensembles socio-politiques aux évolutions contrastées peuvent être distingués: les pays occidentaux les plus avancés économiquement, les pays de l'Europe orientale anciennement "communiste", les pays du Sud en recul et les pays du Sud en développement rapide .

Les pays occidentaux les plus avancés

Dans ces pays, Japon, États-Unis, États de l'Union européenne, ..., en une cinquantaine d'années, l'avancée aura été de plus de 10 ans. Le rythme moyen est de deux à trois mois de gain annuel. Contrairement à ce que l'on pense et annonce souvent, il n'y a pas encore de signe d'arrêt de la progression même là où la durée de vie est la plus élevée (Japon, pays scandinaves,...). Par exemple, durant la décennie fantastique de la conquête de la lune, du développement de la société de consommation et de la voiture pour presque chaque famille, durant ces années d'abondance, en France, en Belgique et en Italie de 1960 à 1970, l'espérance de vie croît d'environ vingt mois alors qu'elle grandit d'une trentaine de mois durant des années supposées moins fastes de1995 à 2005.

Les pays de l'Europe orientale ex "communiste"

L'écroulement des régimes inspirés de communisme a eu des nombreuses causes. Une des causes était le mécontentement des citoyens par rapport aux conditions socio-économiques. Et, en ce qui concerne la durée de vie, le mécontentement était justifié. A partir des années 60, l'espérance de vie stagne ou décroit dans les pays de l'est de l'Europe. Les raisons sont probablement multiples: pollution, alcoolisme, dégradation des conditions sociales et des conditions de santé,... Cette dégradation s'est aujourd'hui généralement interrompue sauf en Russie où la situation des habitants, particulièrement des hommes, est aujourd'hui bien moins bonne que dans bien des États au niveau de développement économique moindre.

Les pays du Sud en recul

L'après-indépendance dans les nations décolonisées a été d'abord presque partout une période positive. Mais, particulièrement durant les 15 ou 20 dernières années du 20ème siècle, de nombreux pays de l'Afrique subsaharienne ont subi les ravages conjugués de l'épidémie du Sida, d'une situation économique dramatique et de guerres civiles. Ainsi entre 1985 et 2005, en 20 années, la durée de vie moyenne d'un citoyen congolais (ex-Zaïre) s'est réduite de sept années (de 60 à 53 ans) et celle d'un Sud-Africain de huit années (de presque 60 ans à moins de 52 ans).

Heureusement, cette évolution n'a pas concerné tous les États de l'Afrique noire. Durant cette même période de 1985 à 2005 citée, les citoyens maliens ont bénéficié d'une longévité accrue de six années et les citoyens malgaches de neuf années. Et surtout, depuis quelques années, l'évolution est redevenue positive ou, au pire stable, presque partout en Afrique. Mais les ravages des décennies précédentes sont encore loin d'être effacés. Des 43 pays du monde où l'espérance de vie est inférieure à 60 ans, seuls quatre sont extérieurs à l'Afrique subsaharienne.

Les pays du Sud en progression rapide

Mais, à côté du drame d'une grande partie de l'Afrique subsaharienne, il y a le miracle des pays qui étaient encore appelés sous-développés il y a 20 ans et qui rejoignent, voire dépassent, le Nord. Globalement, c'est quatre à sept mois de vie qui sont gagnés chaque année. En Chine, l'espérance de vie dans la capitale Pékin dépasse l'espérance de vie à Washington, capitale des États-Unis. Dans le sous-continent indien, la progression a été de 10 années en 30 ans. Et le cas le plus extraordinaire mais aussi le plus méconnu est celui du Bangladesh, un des pays les plus pauvres du monde. L'espérance de vie y a cru de plus de15 ans ces 25 dernières années, dépassant maintenant les 65 ans.

Et le futur ?

Nul ne sait quelle sera l'évolution des prochaines décennies et encore moins du prochain siècle. Une chose est cependant presque certaine. Dans quelques dizaines de mois, voire moins, il y aura un million de centenaires peuplant la planète alors qu'il y en avait probablement moins de 100.000 en 1980. Et les centenaires d'aujourd'hui sont - un peu - en meilleure santé que les centenaires d'hier.


La bonne nouvelle du mois



Dans le cadre du "Partenariat européen pour l'Innovation" (European Innovation Partnership), l'Union européenne va organiser, jusqu'au 28 janvier 2011, une consultation à propos des actions innovantes possibles dans les domaines d'une avancée en âge active et en bonne santé. Les suggestions peuvent concerner notamment les diagnostics et traitements pour les maladies en rapport avec l'âge et des applications et services applicables aux personnes âgées.

Des propositions innovantes pour lutter contre la cause de l'immense majorité des décès dans l'Union européenne sont donc attendues.

Bien sûr, une procédure de consultation et ses suites ne valent pas une percée scientifique majeure. Mais, l'Europe et ses citoyens peuvent contribuer énormément à financer, soutenir et orienter les progrès utiles aux habitants les plus fragiles, c'est-à-dire souvent les plus âgés.



Source de l'image: http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Life_expectancy_1950-2005.png