vendredi 1 mai 2015

Plaidoyer progressiste et technoprogressiste du 1er mai 2015 Pour une vie en bonne santé beaucoup plus longue pour tous


Depuis le 1er mai 2014, l'espérance de vie en bonne santé a augmenté de près d'un trimestre dans le monde. La durée moyenne de la vie des hommes et des femmes en France et en Belgique est de plus de 80 ans. Dans le monde, des millions de citoyens qui seraient morts au cours des douze derniers mois sans progrès de santé et croissance technologique coulent aujourd'hui des jours relativement paisibles.

Jusqu'à la première moitié du siècle passé au moins, le désir de progrès technique et le désir d'égalité sociale étaient liés. La gauche rêvait de lendemains qui chantent. Ces lendemains étaient faits de plus d'égalité, de plus de biens et d'un monde plus facile à vivre matériellement et technologiquement.

Aujourd'hui, malheureusement, les progressistes ne rêvent plus guère de progrès technique, sauf dans une certaine mesure pour les énergies renouvelables. C'est probablement dû au traumatisme de l'échec de l'Union soviétique qui se réclamait du communisme et du progrès technique. Par ailleurs, le développement des pollutions et le réchauffement climatique ont mené beaucoup de progressistes à vouloir "renverser la vapeur" là où il fallait plutôt la purifier et donc l'orienter autrement. Il y a enfin la peur que les progrès augmentent les inégalités.

Pourtant, contrairement à ce que beaucoup pensent, l'accélération du bien-être est plus grande dans les pays du Sud qu'au Nord. La mortalité infantile qui était une source majeure de décès poursuit sa diminution. La pauvreté multidimensionnelle décroît.

Dans ce cadre de progrès humains globaux sans équivalent dans l'histoire de l'humanité, le téléphone mobile est passé en moins d'une génération du statut de bien de luxe à celui d'outil utilisé par la majorité des citoyens du monde. Près de deux milliards de personnes dans le monde sont connectées de manière mobile. Bien avant la fin de cette décennie, la majorité des citoyens devrait avoir un accès mobile à internet. Une part énorme des connaissances collectives universelles sera accessible à une large majorité. Ceci pourra se faire presque sans coût et sans discrimination, surtout si les progressistes se mobilisent en faveur de progrès techniques pour tous.

Dans les développements à court et moyen terme, les (techno)progressistes pourraient exiger que chaque citoyen ait droit à un téléphone dit intelligent (avec des rayonnements faibles, mais avec des accès forts à des services collectifs). Ils pourraient proposer que Google et Wikipédia fonctionnent comme des services publics de plus en plus développés.

Ils devraient également réfléchir à l'impact de la robotisation et des imprimantes 3 D en termes d'accessibilité et de diffusion de biens. Des emplois fastidieux en moins, c'est, dans un monde technoprogressiste, une réduction généralisée du temps de travail possible et une incitation supplémentaire à octroyer un revenu inconditionnel à chaque citoyen.

Une gauche proactive devrait exiger des investissements publics importants pour permettre à tous de vivre mieux et plus longtemps. Aujourd'hui les différences entre espérances de vie au Sud et au Nord s'amenuisent. Mais si les résultats des recherches pour une meilleure santé et une vie plus longue ne sont pas publics, les progrès seront d'abord réservés aux plus aisés, seuls capables de s'offrir les soins et de vivre là où la pollution et les particules fines sont moindres.

En 2015, les investissements publics en faveur de la longévité sont limités alors que Google et d'autres sociétés placent des sommes importantes et engagent des chercheurs renommés dans ce domaine. Cela crée un risque de renforcement des inégalités.

Chaque centime de financement public utilisé avec succès pour des progrès médicaux contre les maladies liées au vieillissement peut bénéficier un jour à toute personne âgée. C'est l'investissement collectif le plus solidaire imaginable actuellement, un bénéfice potentiel pour des milliards d'êtres humains sans distinction de nationalité, d'origine, de capacité financière,...

Une gauche favorable aux progrès devrait donc exiger des avancées technologiques collectives beaucoup plus rapides dans les domaines de la recherche médicale.

Il est vrai que ces progressions gigantesques ne résolvent pas (encore?) tous les problèmes de bien-être. En effet, l'abondance est un instrument insuffisant pour permettre le bonheur de tous. De plus, au-delà d'un certain niveau de confort matériel, la perception du bien-être se fait surtout par comparaison avec le niveau matériel des autres, lequel progresse aussi. Il restera donc un jour à la gauche (et pas qu'à elle) à découvrir comment augmenter le bonheur dans une économie d'abondance où le lait et le miel couleront tellement à flot pour tous que cela ne suffira plus à nous satisfaire.

Pourquoi encore la gauche doit-elle être technoprogressiste? Pour développer l'égalité (radicale) du futur dans un monde où le travail tel que nous le connaissons sera de moins en moins nécessaire. Mais aussi parce que les progressions technologiques comprennent des risques immenses dans les développements contemporains (pollutions, effets de serre, risques pour la vie privée,...) et dans les développements à moyen terme. Ces risques à moyen terme, beaucoup moins souvent abordés, sont des risques existentiels liés à la maîtrise de plus en plus absolue de la structure du vivant, de la matière et surtout liés à une intelligence artificielle incontrôlée. Et le principe de précaution dans une société évoluant, ce n'est pas toujours arrêter les modifications technologiques, cela peut-être au contraire les accélérer pour sauver des vies et diminuer des risques.

Pour que le progrès technique ait le plus de chance d'être aussi un progrès tout court, pour que les lendemains extraordinaires soient aussi des lendemains qui chantent, un des éléments favorables est une gauche proactive, capable de faire primer paix, égalité, justice et souci du bien commun sur les intérêts financiers et matériels à court terme. Peu de politiques de gauche semblent l’avoir compris.

Il faut penser globalement pour agir localement. Il faut aussi penser à long terme pour agir à court terme. La question n'est plus de savoir si les progressions technologiques vont permettre une vie beaucoup plus longue en bonne santé, mais de réfléchir collectivement aux conséquences, de permettre à tous ceux qui le souhaitent de vivre plus longtemps et de maîtriser les risques. La science-fiction d'aujourd'hui, rêve ou cauchemar, voire plus probablement rêve et cauchemar, ne sera pas seulement la réalité de nos enfants, c'est aussi la nôtre.






Réactions: didier.coeurnelle@gmail.com



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