samedi 5 juillet 2014

La mort de la mort. Lettre de juin 2014. Numéro 63.

Question du journaliste: Google et Apple se sont lancés, via Calico dans le soutien (...) de ce projet d'immortalité pour l'homme, de cet homme augmenté. Est-ce que pour vous cela signifie qu'on y va inévitablement ?

Alors, cela dépend à quelle échelle. Si c'est une échelle un petit peu plus lointaine, oui, très certainement. Ce qui est important de souligner, c'est l'imaginaire. Il y a une colonisation de l'imaginaire commun par cette quête de l'immortalité, très certainement. C'est-à-dire que chacun tout d'un coup en fait une question peut-être demain personnelle. Et on y met les moyens financiers et donc cela devient le grand marché, (…) le désir d'immortalité (…). Après, est-ce que nous allons à grands pas vers la démocratisation de cet accès à l'immortalité, là je crois que l'on peut encore être un peu plus calme sur cette arrivée. Cynthia Fleury (philosophe et membre du conseil national d'éthique français). Arte, juin 2014, répondant à Raphaël Hitier.

Thème du mois: la sarcopénie

Le vieillissement est un ensemble de modifications physiologiques successives et progressives qui touchent notre organisme.

Les conséquences externes (rides, perte de cheveux, modification du timbre de la voix, perte d'audition, réduction de l'acuité visuelle...) sont les plus facilement observables, mais c'est à l'intérieur du corps que les effets sont les plus profonds. Une des modifications physiologiques les plus impressionnantes concerne la proportion d'eau dans notre corps. Un bébé est composé d'environ 80 % d'eau, un adulte de 60 % et une personne âgée de 45 % seulement.

Le terme qui définit probablement le mieux le développement progressif des affections pour les personnes âgées, c'est le mot "fragilité". Cette fragilité globale accompagne la croissance avec l'âge des maladies cardiaques, des cancers et des maladies neurodégénératives qui sont les trois grandes catégories d'affection potentiellement les plus souvent létales pour les aînés.

Mais il y a également d'autres affections, moins souvent citées, parce qu'elles sont moins directement dangereuses et qui marquent cette fragilité croissante. La maladie la plus connue est l'ostéoporose, c'est-à-dire la diminution de la masse osseuse, accompagnée d'altérations physiologiques, qui fragilise les os, augmentant le risque de fracture. Cette maladie touche d'abord les femmes après la ménopause, mais peut également atteindre des hommes.

La sarcopénie est une affection qui se caractérise par la diminution de la masse musculaire. Elle se produit presque exclusivement chez des sujets âgés, entraînant d'abord une diminution de la force physique. Elle devient fortement invalidante et, aux stades aigus, elle peut accélérer, voire entraîner le décès.

Le terme sarcopénie est peu connu et utilisé depuis assez peu de temps. La diminution de la masse musculaire, souvent accompagnée d'un développement de l'obésité, est pourtant une difficulté de santé qui touche tous les citoyens âgés sans exception.

Certaines personnes culminent à un âge avancé pour des activités artistiques, scientifiques, politiques, sociales,... Par contre, l'universalité de l'affaiblissement musculaire explique que la puissance physique d'un individu ne reste jamais suffisante pour exercer des activités sportives à un haut niveau après l'âge de 50 ans. Les seules exceptions concernent des sports pour lesquels la force et la résistance physiques sont moins importants que l'habileté (équitation par exemple).

La presse s'est fait l'écho du record de vitesse cycliste établi par un centenaire, monsieur Robert Marchand. Il faut savoir que la distance parcourue en une heure par cet athlète n'est que de 26,9 kilomètres, un peu plus de la moitié du record de l'heure cycliste "classique" de 49,7 kilomètres.

La sarcopénie est importante. En effet, un des meilleurs prédicteurs de l'espérance de vie des personnes âgées est, tout simplement, leur force physique, par exemple la puissance avec laquelle ils peuvent empoigner un objet.

Il n'y a pas de moyen connu à ce jour d'interrompre totalement le processus de perte de masse musculaire. Par contre, ralentir le phénomène est possible par une bonne hygiène de vie comprenant de l'exercice physique régulier.

Pour envisager l'interruption totale de la sarcopénie, il est probable que c'est l'ensemble du mécanisme du vieillissement physiologique qui devra être maîtrisé. Se poser la question de la lutte contre cette affection, c'est en fait se poser la question de la lutte contre le vieillissement dans son ensemble. La réponse dépendra pour une part déterminante des investissements, de la volonté, de l'enthousiasme, de l'imagination et de la ténacité des chercheurs qui, chaque jour, explorent les pistes d'une vie en bonne santé plus longue, plus résiliente et plus épanouie.


Bonne nouvelle du mois: La Grande-Bretagne annonce une lutte accrue contre la maladie d'Alzheimer.

Nous avons besoin de rien de moins que d'une riposte tous azimuts contre la démence, avec nos meilleurs scientifiques dans l'environnement approprié pour développer de meilleurs traitements et, finalement, un remède a déclaré le Premier-Ministre britannique David Cameron le 19 juin 2014 lors du "Global Dementia Legacy Event" à Londres.

Le premier ministre s'est engagé à doubler les moyens financiers pour les recherches à ce sujet d'ici 2025.

S'attaquer à la maladie d'Alzheimer en soi, et pas seulement à ses conséquences, ce n'est pas encore s'attaquer au vieillissement en soi. Mais c'est déjà s'attaquer à la forme de vieillissement qui produit les effets les plus terrifiants pour les personnes âgées et pour les proches.


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