Question
du journaliste: Google et Apple se sont lancés, via Calico dans le soutien (...)
de ce projet d'immortalité pour l'homme, de cet homme augmenté. Est-ce que pour
vous cela signifie qu'on y va inévitablement ?
Alors, cela dépend à quelle échelle. Si c'est une échelle un petit peu
plus lointaine, oui, très certainement. Ce qui est important de souligner,
c'est l'imaginaire. Il y a une colonisation de l'imaginaire commun par cette
quête de l'immortalité, très certainement. C'est-à-dire que chacun tout d'un
coup en fait une question peut-être demain personnelle. Et on y met les moyens
financiers et donc cela devient le grand marché, (…) le désir d'immortalité
(…). Après, est-ce que nous allons à grands pas vers la démocratisation de cet
accès à l'immortalité, là je crois que l'on peut encore être un peu plus calme
sur cette arrivée. Cynthia Fleury (philosophe et membre du conseil national d'éthique
français). Arte, juin 2014, répondant à Raphaël Hitier.
Thème du
mois: la sarcopénie
Le vieillissement est un ensemble de modifications physiologiques successives
et progressives qui touchent notre organisme.
Les conséquences externes (rides, perte de cheveux, modification du
timbre de la voix, perte d'audition, réduction de l'acuité visuelle...) sont
les plus facilement observables, mais c'est à l'intérieur du corps que les
effets sont les plus profonds. Une des modifications physiologiques les plus
impressionnantes concerne la proportion d'eau dans notre corps. Un bébé est
composé d'environ 80 % d'eau, un adulte de 60 % et une personne âgée de 45 %
seulement.
Le terme qui définit probablement le mieux le développement progressif
des affections pour les personnes âgées, c'est le mot "fragilité".
Cette fragilité globale accompagne la croissance avec l'âge des maladies
cardiaques, des cancers et des maladies neurodégénératives qui sont les trois
grandes catégories d'affection potentiellement les plus souvent létales pour
les aînés.
Mais il y a également d'autres affections, moins souvent citées, parce
qu'elles sont moins directement dangereuses et qui marquent cette fragilité
croissante. La maladie la plus connue est l'ostéoporose, c'est-à-dire la
diminution de la masse osseuse, accompagnée d'altérations physiologiques, qui
fragilise les os, augmentant le risque de fracture. Cette maladie touche
d'abord les femmes après la ménopause, mais peut également atteindre des
hommes.
La sarcopénie est une affection qui se caractérise par la diminution de
la masse musculaire. Elle se produit presque exclusivement chez des sujets âgés,
entraînant d'abord une diminution de la force physique. Elle devient fortement
invalidante et, aux stades aigus, elle peut accélérer, voire entraîner le
décès.
Le terme sarcopénie est peu connu et utilisé depuis assez peu de temps. La
diminution de la masse musculaire, souvent accompagnée d'un développement de
l'obésité, est pourtant une difficulté de santé qui touche tous les citoyens
âgés sans exception.
Certaines personnes culminent à un âge avancé pour des activités
artistiques, scientifiques, politiques, sociales,... Par contre, l'universalité
de l'affaiblissement musculaire explique que la puissance physique d'un
individu ne reste jamais suffisante pour exercer des activités sportives à un
haut niveau après l'âge de 50 ans. Les seules exceptions concernent des sports
pour lesquels la force et la résistance physiques sont moins importants que
l'habileté (équitation par exemple).
La presse s'est fait l'écho du record de vitesse cycliste établi par un
centenaire, monsieur Robert Marchand. Il faut savoir que la distance parcourue
en une heure par cet athlète n'est que de 26,9 kilomètres, un peu plus de la
moitié du record de l'heure cycliste "classique" de 49,7 kilomètres.
La sarcopénie est importante. En effet, un des meilleurs prédicteurs de l'espérance
de vie des personnes âgées est, tout simplement, leur force physique, par
exemple la puissance avec laquelle ils peuvent empoigner un objet.
Il n'y a pas de moyen connu à ce jour d'interrompre totalement le
processus de perte de masse musculaire. Par contre, ralentir le phénomène est
possible par une bonne hygiène de vie comprenant de l'exercice physique
régulier.
Pour envisager l'interruption totale de la sarcopénie, il est probable
que c'est l'ensemble du mécanisme du vieillissement physiologique qui devra
être maîtrisé. Se poser la question de la lutte contre cette affection, c'est en
fait se poser la question de la lutte contre le vieillissement dans son ensemble.
La réponse dépendra pour une part déterminante des investissements, de la
volonté, de l'enthousiasme, de l'imagination et de la ténacité des chercheurs
qui, chaque jour, explorent les pistes d'une vie en bonne santé plus longue,
plus résiliente et plus épanouie.
Bonne nouvelle du mois: La
Grande-Bretagne annonce une lutte accrue contre la maladie d'Alzheimer.
Nous avons besoin de rien de moins que d'une riposte tous azimuts contre
la démence, avec nos meilleurs scientifiques dans l'environnement approprié
pour développer de meilleurs traitements et, finalement, un remède
a déclaré le Premier-Ministre britannique David Cameron le 19 juin 2014 lors du
"Global Dementia Legacy Event" à Londres.
Le premier ministre s'est engagé à doubler
les moyens financiers pour les recherches à ce sujet d'ici 2025.
S'attaquer à la maladie d'Alzheimer en
soi, et pas seulement à ses conséquences, ce n'est pas encore s'attaquer au
vieillissement en soi. Mais c'est déjà s'attaquer à la forme de vieillissement
qui produit les effets les plus terrifiants pour les personnes âgées et pour
les proches.
Pour en savoir plus
- De
manière générale, voir notamment:
http://heales.org, http://sens.org et http://longecity.org - A propos de la
sarcopénie: (en français) et http://en.wikipedia.org/wiki/Sarcopenia
(en anglais) et http://fr.wikipedia.org/wiki/Sarcop%C3%A9nie
(en français)
- A propos de l'émission d'Arte citée: http://www.arte.tv/guide/fr/051480-020/futuremag
- A propos du discours de David Cameron: https://www.gov.uk/government/speeches/global-dementia-legacy-event-david-camerons-speech
- Source de l'image "Degrés
des âges" (1826)
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