Toute
personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son
bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement,
le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires
; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de
veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de
subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. Article 25, alinéa 1er, de la
Déclaration universelle des droits de l'homme. Article rédigé à un moment où la
lutte contre les maladies liées au vieillissement n'avait pas la même
signification qu'aujourd'hui. Les droits de l'homme sont évolutifs.
Thème
du mois: Les opinions publiques et la croissance de l'espérance de vie en bonne
santé. Croyances et faits.
Comment réagissent les citoyens par rapport
aux perspectives de croissance de l'espérance de vie?
Il n'y a pas d'uniformité des opinions et
c'est pourquoi cette lettre décrit "les opinions publiques" et pas
"l'opinion publique". Les opinions décrites ci-dessous sont
contradictoires parce qu'elles émanent de segments différents de la population,
mais elles peuvent aussi être exprimées par les mêmes personnes à des moments
différents. Enfin, nombre des idées fréquemment émises s'expliquent en grande
partie par une méconnaissance des faits. En ce qui concerne les éléments
factuels, les liens dans la présente lettre renvoient vers des textes
antérieurs de 'La mort de la mort".
Voici quelques-unes des opinions
fréquentes:
«Nos
enfants seront la première génération à vivre moins longtemps que ses parents»
OU «Un bébé sur deux qui naît aujourd'hui deviendra centenaire»
Les deux affirmations sont entendues asses
souvent. Nul ne sait bien sûr ce que sera le futur. Les optimistes se basent
sur la croissance
de l'espérance de vie depuis plus d'un siècle et l'accélération de progrès
médicaux. Les pessimistes arguent de l'augmentation des pollutions et de modes
de vie néfastes à la santé.
La réalité est qu'actuellement la mortalité
continue à diminuer tant chez les adultes que chez les enfants. Nous gagnons
bon an mal an trois mois de vie en plus par an. Les pessimistes pourront
cependant signaler que la longévité extrême ne croit plus guère actuellement.
En effet, dépasser
l'âge de 110 ans reste un phénomène rarissime.
«Permettre
une vie en bonne santé plus longue est souhaitable» OU «Nous ne devons pas
vivre plus longtemps car nous sommes déjà trop nombreux»
Généralement, l'opinion publique est en
faveur d'un meilleur traitement des personnes âgées. Mais parfois certains
affirment qu'il ne faut pas trop prolonger la vie des aînés en se basant sur la
fausse croyance que l'allongement de la vie provoque une surpopulation. En
fait, les pays
où la population grandit le plus vite sont ceux où l'espérance de vie est la
plus courte.
«Permettre
une vie en bonne santé plus longue, aussi aux personnes fragiles est un
impératif moral» OU «Nous devons laisser la place aux générations suivantes»
Beaucoup de citoyens ont une attitude
ambigüe. Ils défendent ardemment les personnes âgées proches en réclamant de
meilleurs soins, des maisons de repos plus adaptées et un plus grand respect.
Mais lorsque les progrès médicaux sont cités comme moyen pour permettre plus de
bien-être plus longtemps aux personnes âgées dans leur ensemble, des
oppositions se font entendre au nom des générations futures. Une des raisons de
ce paradoxe est que les soins à "nos" ainés concernent des individus
que nous connaissons alors que les bénéficiaires des progrès médicaux sont des
individus inconnus. Un mort dû à de mauvais traitements dans un hospice, c'est
un drame. Dix pour cent de morts de personnes âgées en plus parce que des
techniques médicales nouvelles ne sont pas mises en œuvre, c'est perçu comme
une statistique. Derrière les statistiques de décès, il y a pourtant des
millions d'émotions et de souffrances.
Il est presque certain que la partie de
l'opinion publique qui se préoccupe des générations futures se préoccuperait au
moins autant de retarder des souffrances si elle voyait l'effet concret de
l'absence de progrès sur des personnes âgées proches.
«Tout
progrès médical qui améliore la vie en bonne santé est positif» OU «La science
et la médecine doivent respecter l'ordre naturel des choses»
La conviction qu'il y a des médecines et
des traitements "naturels" contre le vieillissement et d'autres qui
ne le sont pas est intéressante, mais repose sur plusieurs erreurs.
D'abord, dans la nature, le vieillissement
n'est que très rarement naturel. Les animaux sont rapidement éliminés par les
prédateurs, les parasites... dès les premiers signes d'affaiblissement.
Ensuite, il n'y a presque pas de médecine
"naturelle". L'histoire de l'humanité (Homo sapiens sapiens) a débuté
il y a plus de 100.000 ans. L'immense majorité des médecines ne sont nées qu'il
n'y a que quelques siècles. Avant, nous ignorions par exemple que le cerveau
était le lieu de la conscience, que le sang circulait à travers tout le corps
et même parfois (comme chez les
religieux taoïstes par exemple) que manger et respirer sont indispensables à la
vie.
En fait, pour l'opinion publique
majoritaire, il y a, au regard du temps qui passe, trois types de médecine:
·
les
médecines traditionnelles antérieures (ou parfois extérieures) à la médecine
actuellement enseignée dans les universités;
·
la
médecine actuellement largement pratiquée;
·
les
recherches médicales en cours.
Souvent, les citoyens les plus réticents
aux progrès médicaux définissent les nouvelles techniques comme inutilement
invasives, se mêlant trop intimement à notre corps. En fait, la transfusion sanguine
et les greffes d'organes sont des techniques bien plus invasives que les
nouvelles techniques médicales. La véritable raison est l'attitude vis-à-vis
des nouveautés ce qui amène à l'affirmation suivante.
«La
médecine fait des progrès extraordinaires» OU «La médecine moderne est
dangereuse»
Les citoyens expriment souvent le souhait
de recevoir et de rendre accessibles à tous les soins les plus modernes. En
même temps, ils s'inquiètent des dangers des nouvelles technologies.
Une des différences majeures pour les
citoyens se situe dans le caractère perçu comme libre ou pas de la nouveauté.
Par exemple, une vaccination ou un nouveau traitement facultatif sera plus
acceptable qu'en cas d'imposition.
Mais la raison principale de la peur
vis-à-vis des nouveautés est probablement que l'information médicale disponible
pour un large public met plus l'accent sur les échecs et sur les risques que
sur les progressions concrètes. Les découvertes médicales spectaculaires sont
décrites par les médias, mais pas l'effet positif progressif en termes de
qualité et de durée de vie pour les citoyens. Par contre, les accidents
médicaux, en particulièrement avec de nouvelles techniques, auront un succès
médiatique assuré.
«Lutter
contre le vieillissement est acceptable d'un point de vue religieux» OU «Lutter
contre le vieillissement est contraire à la volonté de Dieu»
Rien dans les textes fondamentaux des
religions les plus courantes ne s'oppose aux soins aux personnes âgées. Mais
ces textes fondateurs n'ont pas envisagé les progrès médicaux. En pratique,
jusqu'ici, les dirigeants religieux se sont généralement adaptés aux
progressions médicales, une fois qu'elles se sont répandues. Hier, l'opinion
publique aurait été scandalisée par une greffe ou une transfusion. Aujourd'hui,
l'opinion publique est scandalisée lorsque des témoins de Jéhovah refusent les
greffes ou les transfusions pour leurs enfants. Après-demain, les mêmes
personnes pourront être scandalisées si certains veulent refuser des soins de
réjuvénation pour les personnes les plus âgées.
«La
vie est trop courte» OU «Il vaut mieux vivre moins longtemps, mais mieux»
La majorité de nos contemporains se
plaignent de manquer de temps, mais simultanément beaucoup affirment que
l'ennui naitrait d'une vie trop longue. Ceux qui développent la vision
pessimiste ignorent que les personnes
plus âgées sont généralement plus heureuses que les autres citoyens, moins
violentes et plus respectueuses de l'environnement.
Lorsqu'ils sont interrogés sur le temps
qu'ils désirent vivre, globalement les femmes et les hommes donnent trois types
de réponse:
·
Je
voudrais vivre 70 ou 80 ans (la durée normale de vie aujourd'hui)
·
Je
voudrais vivre 100 ou 120 ans (la durée maximale de vie aujourd'hui)
·
Plus
rarement, je voudrais vivre sans limite de durée.
Mais presque personne ne répond qu'il
voudrait vivre 50 ans, la durée "naturelle" maximale de vie durant
plus de 90 pour cent de l'histoire de l'humanité.
En conclusion, les opinions publiques sont
globalement prudentes, souvent contradictoires et changeantes. Ces changements
de l'opinion peuvent être beaucoup plus rapides ... que ce que l'opinion
publique perçoit. Qui se serait par exemple imaginé il y a 20 ans que
l'essentiel de nos idées serait diffusé par voie électronique sans que presque
personne ne s'en émeuve. Nous pourrions nous adapter à une vie avec un
vieillissement négligeable presque sans nous en rendre compte. Le
vieillissement est un phénomène imperceptible au jour le jour, la fin du vieillissement
par des progrès médicaux successifs pourrait être aussi une évolution sans
révolution pour la majorité des citoyens.
La bonne nouvelle du mois: l'intelligence
artificielle d'IBM affronte la médecine de pointe
En
2011, le système informatique Watson, mis au point par la société IBM avait
réussi à battre les meilleurs champions du jeu américain de culture générale
Jeopardy. Deux ans plus tard, une première application médicale de ce logiciel
est en développement. Il s'agit d'un outil "d'aide à la décision" en
matière de traitement du cancer. Cette application est actuellement testée au "Memorial
Sloan–Kettering Cancer Center" de New York en collaboration avec une grande
compagnie américaine d'assurance maladie "WellPoint". Une
extraordinaire puissance de déduction médicale pourrait bientôt être accessible
aux victimes de cancer.
Pour
en savoir plus :
- De manière générale: http://heales.org, http://longecity.org, http://sens.org et http://immortalite.org
- A propos d'IBM Watson et des applications médicales: http://www.zdnet.com/after-a-year-of-medical-school-ibms-watson-passes-first-milestone-7000011062/
(en anglais)
- Source de l'image: Réseaux sociaux
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